jeudi 26 mai 2011

Batte-feu

Une question anodine de ma sœur Mireille : d’où vient l’expression batte-feu? Sans le savoir — ou le sachant trop bien —, elle me remet sur la branche qui m’allume — clin d’œil malin —, l’étymologie et surtout sur l’histoire quelque peu alambiquée de ce fameux batte-feu.

L’histoire commence par un mot qui semble très loin de la question : le mot brique.

Brique

Brique, emprunté au néerlandais bricke (petit morceau, pièce) qu’on peut sûrement rattacher au verbe de même origine breken (casser en morceau) à l’origine du verbe anglais to break (casser), à comme première valeur en français petit morceau, petite pièce, miette. Ce sens est sorti d’usage quoiqu’on le retrouve encore dans l’expression argotique bouffer des briques, c’est-à-dire n’avoir rien à manger.

Le mot brique a commencé par la suite à désigner petit morceau moulé, en particulier petit morceau moulé en terre cuite. Puis, il a désigné une liasse de billets de banque, d’où est tiré le sens argotique d’une brique, soit un million de dollars.

Briquet

Briquet est un diminutif de brique signifiant lui aussi petit morceau, petite quantité. Ce sens survit dans quelques spécialisations du mot dont petit morceau d’acier avec lequel on bat le silex pour un tirer une étincelle. Auparavant, on employait le mot fusil dans ce sens.

Fusil

Le mot fusil vient du latin populaire focilis (qui produit du feu), lui-même tiré de focus (feu) qui a donné en français foyer et focal. On désignait par focilis petra (pierre à feu), chacun des morceaux de silex qu’on frappait ensemble pour produire l’étincelle et finalement allumer le feu. Le mot fusil a ensuite désigné un morceau d’acier avec lequel on frappait ou battait le silex pour en tirer du feu. Ce sens est resté dans l’expression pierre à fusil et aussi dans fusil de boucher (baguette d’acier servant à aiguiser les couteaux).

Dans les anciennes armes à feu, le fusil était une pièce d’acier contre laquelle venait frapper le silex permettant d’allumer la poudre pour faire partir le coup de feu. Par métonymie, fusil s’est mis à désigner l’arme à feu qui comportait à l’origine cette pièce. Le mot fusil ayant perdu son sens d’origine fur donc remplacé par briquet.

Battre le briquet

La locution battre le briquet (1), encore employé aujourd’hui au sens figuré, signifiait donc frapper le silex à l’aide d’un petit morceau d’acier. Le sens de briquet s’est ensuite étendu pour désigner un petit appareil servant à produire du feu, au départ formé d’une pierre à feu et d’amadou (matériau qui s’enflamme facilement), aujourd’hui alimenté à l’essence ou au gaz.

Soulignons en passant que le mot amadou est d’origine assez obscure et appartient à l’argot des truands et mendiants de Paris. Son dérivé amadouer a d’abord signifié frotter avec de l’amadou, c’est-à-dire se frotter le visage avec une préparation jaunissant le teint pour paraître malades et provoquer la pitié. Amadouer a par la suite signifié apaiser, flatter par de belles paroles avec l’intention de tromper. On trouve aussi comme sens figuré de battre le briquet, avoir les genoux qui se touchent quand on marche, être cagneux.

Une digression ici s’impose. Dans la comptine enfantine Au clair de la lune, on fait référence à battre le briquet (2). Il s’agit bien entendu d’un jeu de mot sur le sens figuré de battre le briquet, débiter ses sentiments à une femme, allumer la flamme de l’amour, plus trivialement allumer une femme et enfin lui faire l’amour. D’ailleurs quand on lit la comptine au complet, on s’aperçoit du clin d’œil grivois et des références au sexe cachées dans le texte. Par exemple, un lubin (loup) désigne un moine cachant un cœur de loup, donc dépravé. À compter de cette interprétation, on peut chercher le sens imagé et pas si caché de chandelle, plume, etc.

Batte-feu

Mais revenons à notre propos. On employait autrefois couramment l’expression briquet à battre le feu pour désigner l’objet. On disait aussi battre le briquet pour allumer le feu. Toutes ces expressions viennent de l’habitude de désigner le fusil et plus tard le briquet par les expressions acier à battre le feu, pierre à battre le feu ou fusil pour battre le feu.

Le déverbal batte désigne d’abord une clenche ou un loquet, sens sorti d’usage; puis, il a désigné, vers 1471) un instrument servant à battre, d’où batte-feu.

Les premiers européens à venir au Canada importèrent avec eux ces expressions et ont commencé à désigner le fusil, puis le briquet par batte-feu, l’appareil pour battre le feu.

(1)
Production du feu grâce à un morceau de marcassite, un éclat de silex et un fragment d'amadou
(image à venir)

Production du feu grâce à un briquet, un éclat de silex et un fragment d’amadou
(image à venir)


(2)
Au clair de la lune

Au clair de la lune, mon ami Pierrot
Prête-moi ta plume, pour écrire un mot.
Ma chandelle est morte, je n'ai plus de feu.
Ouvre-moi ta porte, pour l'amour de Dieu.

Au clair de la lune, Pierrot répondit :
- « Je n'ai pas de plume, je suis dans mon lit.
Va chez la voisine, je crois qu'elle y est
Car dans sa cuisine, on bat le briquet. »

Au clair de la lune, l'aimable lubin
Frappe chez la brune, elle répond soudain
- « Qui frappe de la sorte ? », il dit à son tour
- « Ouvrez votre porte pour le Dieu d'Amour »

Au clair de la lune, on n'y voit qu'un peu
On chercha la plume, on chercha du feu
En cherchant d'la sorte je n'sais c'qu'on trouva
Mais je sais qu'la porte sur eux se ferma.

jeudi 4 février 2010

Payer rubis sur l'ongle

Procédons par étape.

Tout d'abord, le mot rubis vient , par un long détour (rubi < robi < robin < rubin < rubinus) du latin rubeus (rouge).

Étant donné la parenté des mots désignant la couleur rouge dans différentes langues, on a supposé une racine indo-européenne *reudho ou *roudho ou *wrhodon qui a donné le grec eruthros (rouge) d'où sont tirés les mots français érythrocyte (globule rouge), érysipèle (inflammation rougeâtre de la peau), rhododendron (arbre à roses ou laurier-rose), rhodium (le métal); et enfin surtout le mot français rose (la fleur et la couleur) avec tous ses dérivés.

La racine indo-européenne a aussi donné les mots latins latin ruber (rouge) d'où rubrique (ce qui est écrit en caractère rouge); rubeus (rougeâtre) qui a donné rouge, rougeole, rougir, rubis (la pierre rouge), rubéole (maladie éruptive rappelant la rougeole), rubicond (dont le visage est rouge); robus (chêne rouge) d'où robuste (résistant comme le chêne rouge, réputé comme le plus dur des bois), rouvre (chêne au bois très dur), corroborer (appuyer, confirmer) et Robur (le héros d'une roman de Jules Verne); rutilans (rutilant), robigo (rouille), russus (roux) qui a donné roux (la couleur et la base de sauce), roussir (rendre roux), rissoler (cuire jusqu'à une couleur dorée) ainsi que les noms de famille Rousseau et Roussel.

La même racine indo-européenne a donné les mots anglais red, le breton ruz, l'irlandais ruad, l'allemand rot, le hollandais rood, le suédois röd, le danois rød et le russe rdet. Tous ces mots signifient la couleur rouge.

Le mot ongle, quant à lui, vient du latin ungula (petit ongle), un diminutif d'unguis (ongle). Lui ausi remonte à une racine indo-européenne *nogh et *onogh qui a donné le grec onux d'où le français onyx (pierre précieuse rappelant les reflets de l’ongle), le sanskrit nakkah, le norois nagli, le vieux slave noguti, le vieux gallois eguin (devenu ewin en gallois moderne), en breton ivin, le vieil irlandais ingen, (devenu ionga en irlandais moderne), l'ancien haut-allemand nagal, (devenu nagel en allemand moderne), le danois negl, le lituanien nagas, l'italien unghia et enfin l'anglais nail. Le sens est partout ongle sauf en sankrit et en vieux slave où le mot signifie sabot et pied.

Le mot français nacre vient de l’italien nacarro (ou naccara, nacharra, nacchera) qui désigne à la fois un instrument de percussion et la matière blanche à reflets irisés de certains coquillages. Le mot italien est emprunté à l’arabe naqqara (petit tambour en forme de corne de chasse), lui-même tiré du sanskrit nakkah (sabot de corne, pied).

Le grec onux a servi à former paronukhia (de para, près de et de onux, ongle) qui désignait un abcès à la base de l'ongle. a donné le latin panaricium, d'où nous avons tiré le français panaris. Le même mot grec a servi à former onychophagie (d’onux et de phagein, manger), une mauvaise habitude affectant plusieurs personnes.

Sens de l'expression

Au départ, l'expression était "faire rubis sur l'ongle", c'est-à-dire boire jusqu'à la dernière goutte de vin.

En effet, si le verre est vraiment vide, la seule goutte (les dernières gouttes s'appelant comme tu le sais les amours) qui peut sortir du verre de vin rouge (le vin rouge était le plus usuel à l'époque du premier emploi écrit de l'expression vers 1640) que l'on renverse complètement est une mini-goutte de vin rouge qui tient sur l'ongle sans s'épancher, s'écouler. Cette mini-goutte pouvait s'assimiler à un rubis, tant pour la forme que la couleur.

De l'idée de boire jusqu'à la dernière goutte, on est passé à payer rubis sur l'ongle (vers 1668), c'est-à-dire jusqu'au dernier sol (sou) et immédiatement après consommation.

Note : L’indo-européen est une langue mère parlée il y a près de 100 000 ans donc les racines sont reconstituées à partir des mots apparentés dans différentes langues.
édiatement après consommation.

lundi 1 février 2010

Seiner, seineur, seineux

Je me suis maintenant fait une tête sur l'origine des mots seiner/senner, seineur/senneur et seineux/senneux.

Il fallait réconcilier les expressions suivantes :
Il m'a encore seiné de l'argent.
As-tu vu le joueur des Canadiens : il est en train de seiner à la ligne bleue adverse.
Il vient toujours en visite autour de 5 heures : il va encore nous seiner un souper.

Il m'apparaît maintenant clairement que ces mots viennent sûrement du verbe seiner/senner signifiant pêcher à la seine/senne, la seine/senne étant le filet de pêche qu'on laisse traîner au fond de l'eau pour ramasser le poisson.

Le verbe apparaît dans les vieux Larousse, Robert et Littré. Le premiers français l'on probablement importé au Canada sous cette forme de seiner ou seineux, dans le sens de solliciter, solliciteur, d’où seineuse pour celle qui sollicite des clients (prostituée).

Il s'agit donc de vieux français et non d'un anglicisme comme je l'avais d'abord supposé.

J'ai trouvé des références intéressantes de ce mot dans Le débutant d'Arsène Bessette (2209) où l'on parle de ces femmes expertes dans l'art de tendre leur croupe et de lancer leurs filets pour attraper le poisson :

" La nuit tombait. La rue s’éclairait peu à peu de pâles reflets électriques, et aux devantures des magasins les
78vitrines brillaient de mille feux donnant un attrait fascinateur aux objets étalés pour exciter la convoitise des passants. D’une ruelle sombre un homme à moitié ivre, ayant une femme à chaque bras, apparut en pleine lumière, en face des deux amis. Le trio les croisa et Paul Mirot crut reconnaître l’une des femmes, une grande brune déhanchée. C’était, assurément, la même qu’il avait rencontrée rue Saint-Laurent, le jour de son arrivée. Jacques Vaillant remarqua la persistance avec laquelle il suivait cette femme du regard, et lui demanda : – Est-ce que, par hasard, tu connaîtrais cette seineuse ? – Cette seineuse ? – Les seineuses sont les concurrentes des pianolegs. On les nomme seineuses parce que, si elles n’ont pas l’avantage des mollets découverts et l’attrait qu’inspire aux esprits déréglés le mystère des petites filles, elles sont, en revanche, plus expertes en l’art de tendre leur croupe et de jeter leurs filets pour attraper le poisson. Cette grande brune est, si je ne me trompe pas, la bonne amie de Solyme Lafarce, qui, en plus de son métier de reporter, exerce celui de pourvoyeur de clients dans la maison où cette drôlesse exploite ses jolis talents. Mais tu n’as pas encore répondu à ma question, connais-tu cette femme ? "

Vous pouvez même lire son roman en ligne si ça vous tente : http://www.docuter.com/viewer.asp?documentid=14758335364a41da7b97ad11245829755&bessette-debutant

Louise-Laurence Larivière, dans son Guide de féminisation des noms communs de personnes (2005), le qualifie de québécisme et suggère seineux, seineuse.
http://www.google.ca/search?hl=fr&client=firefox-a&rlz=1R1RNFA_fr___CA356&hs=Qu2&q=seineuse&btnG=Rechercher&meta=&aq=f&oq=

Il semble malgré tout que certains donnent au mot seineux, épieur, écornifleur comme en fait fois ce texte d'Alexandra Lussier (2002) intitulée La seineuse : http://www.cssh.qc.ca/ecoles/maurice-jodoin/projets/2ecycle/legendes/animal/seineuse.htm

vendredi 8 août 2008

Soupe ou potage

Voyage au pays des mots

Dans le langage courant, ces deux mots sont souvent employés l’un pour l’autre. En gastronomie, déjà, on fait une distinction. L’étymologie aide souvent à y voir plus clair.

Le mot potage ne crée pas de difficulté. C’est un dérivé ancien du mot pot, lui-même tiré d’un racine pré-celtique ºpott-, probablement introduit en Gaule par les Francs. Ce radical semble exprimer une idée de rondeur qu’on retrouve dans potelé. Il désigne au départ (vers 1155) un récipient de ménage contenant des liquides et des aliments. Potage, son dérivé (vers 1240) par l’addition d’un suffixe en -age, suggère l’idée de son contenu, des aliments cuits, d’où potager, le jardin où l’on fait pousser les légumes servant à préparer le potage. Puis, le potage en vint à désigner des aliments cuits dans un bouillon, puis le bouillon lui-même.

Le mot soupe lui vient du bas latin suppa (vers 500) qui a fourni l’italien zuppa, l’espagnol sopa utilisé aussi par le catalan et le portugais. Suppa lui-même est d’origine discutée; pour les uns, il vient du germanique supôn (assaisonnement) qui a donné le néerlandais sopen et l’anglais to sop (tremper, dans les deux cas); d’autres le raccordent plutôt au latin classique suppus (tourné vers le haut, couché sur le dos).

La soupe est donc d’abord une tranche de pain que l’on dépose dans un plat (soupière) et qu’on arrose d’un liquide chaud, du vin ou du bouillon. La soupe a aussi désigné, au Moyen-Âge, la miche de pain coupé en deux et qui servait d’assiette pour le potage. Tremper la soupe signifiait verser le bouillon sur la tranche de pain, puis commercer à servir le repas et enfin que le dîner est servi (la soupe est trempée).
Plus tard (vers 1310), la soupe a commencé à désigner par métonymie le bouillon lui-même épaissi par des tranches de pain ou des aliments solides (vers 1310), puis en vint à concurrencer potage, considéré comme plus noble.

Ce qu’on appelle aujourd’hui pain doré ou pain perdu est un dessert consistant en une tranche de pain trempée dans du lait et des œufs battus puis frite et sucrée. Ce dessert s’appelait autrefois soupe dorée, ce qui montre bien ce que désignait le mot soupe.

Les dieux brillent dans les cieux

Un peu d’étymologie


Les dieux brillent dans les cieux


Les différents noms de Dieu sont nombreux et variés selon les pays et les civilisations. Le mot dieu lui-même en français vient d’une racine indo-européenne *odei (briller) prolongé en *odeiwo à rapprocher d’un mot sanscrit qui a servi à désigner le ciel lumineux considéré comme divinité et par extension la lumière terrestre. La même racine a donné en français adieu, devin, divin, diva, déesse, Diane, jour, journal, séjour, jovial, quotidien, diurne, midi, lundi, mardi, dimanche, etc. et en anglais dismal, Jove, Tuesday, diary, journey, dial, diet, adjourn, etc.

Zeus est l'une des rares divinités grecques dont le nom est d'origine indo-européenne. En effet, l'étymologie de son nom l'associe aux cieux. Zeus est à rapprocher d'un mot sanscrit qui s'apparente au ciel, d'un mot latin dies (jour), ainsi que de la première syllabe de Jupiter (ciel – père ou père des cieux), dieu auquel les Romains l'identifieront.

En langues cananéenne et chaldéenne, dieu est dit El qui a donné Eli (employé par Jésus sur la croix : "Eli, Eli, lama sa-bach-tha-na? – Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?), Ilu qu’on retrouve dans le mot Babylone (de Bab Ilu = Dieu de la porte), Allāh en arabe, āllāhā en araméen, Elohīm en hébreu. El étant un dieu païen, la Bible emploie le mot Elohīm qui signifie dieu (El) le plus puissant (oh) avec le im qui exprime le pluriel, ici de politesse, ce qui n’est pas rare dans les langues orientales. Elohim est le nom générique de Dieu.

Beaucoup de noms hébreux seront formés à partir de El, nom abrégé de Elohim. En général, tous les noms qui se termine en français par ël ou quelquefois el incluent le mot dieu en langue sémitique : Raphaël (Dieu guérit), Emmanuel (Dieu avec toi), Gabriel (force de Dieu).

La Bible utilise également le nom de Yahvé, un mot ineffable (de in privatif et effari = parler), c’est-à-dire qu’on ne peut ni prononcer ni écrire. Pour le représenter par écrit, on emploie le tétragramme YHVH qu’on prononce Adonaï, de Adon, seigneur et , ici encore pluriel de politesse. Plusieurs théories existent sur l’étymologie de ce mot. La plus courante dit que ce nom vient du verbe havah (devenir) conjugué à l'imparfait de la forme causative (qui correspond au français faire faire). En conséquence, il se rend par il fait devenir. D’autres disent qu’il faut traduire par il est ou encore il devient, ce qui pourrait se rendre par l’Éternel, celui qui est et qui devient. Yahvé est le nom propre de Dieu. On a plus tard prononcé Jéhovah le tétragramme YHVH.

Beaucoup de noms occidentaux sont formés sur les noms hébreux dont la racine comprend la lettre J (suivie d’une voyelle). Par exemple, Jean ou Johanne (Dieu a fait grâce), Jésus (Dieu sauve), Joseph (Dieu ajoute), Joël (Yahvé est Dieu), nom qui a la particularité d’être formé sur la racine El et J.

Enfin, les langues védique, sumérienne ou syrienne utilisent, pour désigner Yahvé sans le prononcer, le mot shaddai, de shad (maître) et dai (tout puissant) qui est l’un des épithètes de Dieu et qui a donné le prénom Shad.

mardi 8 juillet 2008

Mon beau-frère est anglophone

Ce blogue (blog), Les Jacasseries, vous livre des commentaires, des recherches et des réflexions sur l'étymologie, les mots et les langues.Vous pouvez aussi consulter le blogue (blog)Les Jacqueries, pour des commentaires sur les aventures de la famille et autres sujets d'intérêt.


Step
-

Le préfixe step- dérive du vieil anglais steap (bereaved, orphan), lui-même dérivé d'une source indo-européenne qui a donné aussi le haut allemand stiufen, le vieux frison stiap-, le moyen bas allemand stef-, le hollandais stief-, le vieil islandais stjup-, le suédois styv-, le vieux danois stiup- et le norvégien ste-.


La forme actuelle step- vient du vieil anglais steopcild (stepchild) qui signifiait orphelin. La forme steop- vient lui-elle du vieil anglais astiepan/bestiepan (bereave), apparentée au vieux haut allemand arstiufen/bestiufen.

Avant l’an 800, stepfather/stepmother signifiait celui qui devient le père/la mère d’un orphelin, et stepson/stepdaughter signifiait un orphelin qui devient un fils/une fille par le remariage de son parent.

Les mots in-law, pour désigner dans diverses expressions anglaises les relations entre personnes découlant du mariage de l’une d’elles, sont une abréviations pour in Canon Law, en référence au droit canon de l’église catholique où sont décrits les différents degrés d’affinité ou de parenté entre les personnes qui peuvent autoriser leur union ou la proscrire. Ces règles, plusieurs fois modifiées au fil des siècles lors de divers conciles, proviennent du Lévitique de Moïse, qu'on suppose avoir été écrit aux alentours de 1300 av. J.-C.

En français, l’adjectif beau comme préfixe dans l’expression beau-père ou belle-mère, apparaît dès le Xe siècle. Il est employé dans un sens affaibli du point de vue sémantique comme terme flatteur à l’adresse d’une personne estimée.

Quant au mot bru, qui tend à disparaître de l’usage au profit du mot belle-fille, il vient du latin des Balkans brutis qui est attesté dès le IIIe siècle et qui signifie belle-fille. Ce terme de la vie familiale a été introduit par les Goths lors de leur pénétration de l’Empire romain. Brutis lui-même vient du germanique ancien *bru-diz restitué par le gotique brups (jeune mariée), l’ancien norrois et le haut allemand brut (qui a donné le mot allemand Braut, la jeune mariée), et le vieil anglais bryd qui a donné l’anglais bride.


La raison pour laquelle le même mot en français peut désigner deux réalités différentes alors qu’en anglais, on emploie deux mots pour ce faire, n’est qu’une question de circonstance et du génie de chacune des langues. La même chose arrive couramment dans le sens inverse.


Si on veut le constater, il n’est qu’à prendre le dictionnaire anglais-français ou français-anglais et chaque page déborde d’exemples de mots différents dans une langue pour traduire un même mot dans l'autre langue. Il en est de même de toutes les langues, incluant la belle langue italienne qui nous a donné un proverbe illutrant parfaitement mon propos : traduttore, tradittore.

Bassin de la chute Montmorency

Ce blogue (blog), Les Jacasseries, vous livre des commentaires, des recherches et des réflexions sur l'étymologie, les mots et les langues.Vous pouvez aussi consulter le blogue (blog)Les Jacqueries, pour des commentaires sur les aventures de la famille et autres sujets d'intérêt.

Un nom pour le bassin de la chute


Jean Laurin, directeur du Parc de la Chute Montmorency, et Danielle Turcotte, directrice de la Commission de toponymie, ont récemment lancé un concours pour baptiser le bassin situé au bas de la célèbre chute. Vous avez jusqu’au 31 août 2008 pour y aller de vos suggestions. L’historien Jacques Lacoursière se joindra aux deux personnes susnommées pour former le jury qui aura à choisir le nom retenu, qui sera dévoilé le 3 octobre prochain.

Pour inscrire vos suggestions : http://www.toponymie.gouv.qc.ca/CT/concours.html.


J'ai bien aimé l'idée de ce concours et je me suis mis immédiatement à la tâche pour tenter d'influencer son déroulement.

J'ai imaginé, sérieusement pour certains noms et de façon humoristique pour d'autres, les appellations suivantes que je vous propose.


Propositions probablement sérieuses


Bassin Chantilly : les chutes doivent leur nom à Henry II, duc de Montmorency (30 avril 1595 - 30 novembre 1632) qui est né au Château de Chantilly.

Bassin Vatel : François Vatel, de son vrai nom Fritz Karl Watel (1631- 24 avril 1671), aurait donné le nom de Chantilly à cette crème fraîche fouettée, alors qu’il était pâtissier-traiteur et maître d’hôtel de Louis II de Bourbon-Condé dit le Grand Condé (8 septembre 1621 - 11 décembre 1686), au Château de Chantilly.

Selon la légende, cette crème serait née quelques années auparavant, d'un incident de cuisine à Vaux-le-Vicomte. La crème fraîche ayant manqué lors d’un repas, un marmiton aurait eu l'idée de la fouetter pour en augmenter le volume et ainsi servir tous les invités.

Une autre version veut que Vatel lui-même inventa la crème, alors qu’il était maître d’hôtel du surintendant des finances du royaume, Nicolas Foucquet (27 janvier 1615 - 1680), au Château de Vaux-le-Vicomte, lors d’un repas donné en l’honneur Louis XIV, accompagné de la reine-mère, Anne d’Autriche, et de toute la cour, le 17 août 1661. Pour le dessert, une surprise inventée par Vatel, une nouveauté mousseuse, sucrée, parfumée, fouettée avec des branchettes de buis ou d'osier : la crème, qu'on appellera plus tard Chantilly, était née, en même temps que la légende !


Bassin Fontenaud : en l’honneur de Jean Fontenaud ou Fonteneau (1482 - ~1557), qui fut le pilote de Jean-François de La Rocque de Roberval (aussi connu sous le nom de sieur de Roberval) (1500 - 1560), lors son voyage au Canada en 1542-1543. C’est Fontenaud qui fit mention des chutes par écrit pour la première fois, selon certains historiens, ce dont on peut douter.


Bassin Champlain : en l’honneur de Samuel de Champlain (~1580 – 25 décembre 1635) qui baptisa les chutes en 1608 en oubliant de baptiser en même temps le bassin, ce que cette proposition corrige rétrospectivement.


Propositions mi-figue mi-raisin


Bassin lorrain : Le Cardinal Jean de Lorraine (9 avril 1798 – 18 mai 1550) et le connétable Anne de Montmorency (15 mars 1492 – 12 novembre 1567) furent des personnes très influentes, simultanément ou chacun leur tour, à la cour de François 1er (1494 – 1547), le roi qui envoya Jacques Cartier 1491 – 1er septembre 1557) en expédition pour découvrir « certaines îles et pays où l’on dit qu’il se doit trouver grande quantité d’or et autres riches choses » et qui vit les célèbres chutes au cours de ses trois voyages. Anne de Montmorency est le grand-père d’Henri II de Montmorency en l’honneur de qui sont désignées les chutes.

On peut aussi penser à tort que cette obséquieuse proposition ne vise qu'à flatter l'un des juges du concours, le directeur général du parc des Chutes Montmorency, Jean Laurin, que je salue bien bas.


Bassin Dallaire ou bassin des Grands-feux : en l’honneur de Marcel Dallaire, le promoteur des Grands feux Loto-Québec ou de son œuvre.


Bassin Labeaume, bassin Boucher, bassin L’Allier, bassin Pelletier, bassin Lamontagne : en l’honneur des maires qui ont vu leur portrait respectif installé récemment à l’hôtel de ville et pour la polémique que cela pourrait susciter et qui pourrait aider la notoriété des fêtes du 400e.


Bassin Pierre : pour le jeu de mots et pour souligner qu’on peut voir les chutes de cette paroisse de l’Île d’Orléans.


Bassin Rabaska : pour que le nom ne sombre pas dans l’oubli si jamais les projets d’implantation portuaire ne se réalisent pas.

J'espère que j'aurai ainsi allumé l'imagination des autres lecteurs qui se rendront nombreux voter pour un nouveau nom pour nos célèbres chutes.