vendredi 8 août 2008

Soupe ou potage

Voyage au pays des mots

Dans le langage courant, ces deux mots sont souvent employés l’un pour l’autre. En gastronomie, déjà, on fait une distinction. L’étymologie aide souvent à y voir plus clair.

Le mot potage ne crée pas de difficulté. C’est un dérivé ancien du mot pot, lui-même tiré d’un racine pré-celtique ºpott-, probablement introduit en Gaule par les Francs. Ce radical semble exprimer une idée de rondeur qu’on retrouve dans potelé. Il désigne au départ (vers 1155) un récipient de ménage contenant des liquides et des aliments. Potage, son dérivé (vers 1240) par l’addition d’un suffixe en -age, suggère l’idée de son contenu, des aliments cuits, d’où potager, le jardin où l’on fait pousser les légumes servant à préparer le potage. Puis, le potage en vint à désigner des aliments cuits dans un bouillon, puis le bouillon lui-même.

Le mot soupe lui vient du bas latin suppa (vers 500) qui a fourni l’italien zuppa, l’espagnol sopa utilisé aussi par le catalan et le portugais. Suppa lui-même est d’origine discutée; pour les uns, il vient du germanique supôn (assaisonnement) qui a donné le néerlandais sopen et l’anglais to sop (tremper, dans les deux cas); d’autres le raccordent plutôt au latin classique suppus (tourné vers le haut, couché sur le dos).

La soupe est donc d’abord une tranche de pain que l’on dépose dans un plat (soupière) et qu’on arrose d’un liquide chaud, du vin ou du bouillon. La soupe a aussi désigné, au Moyen-Âge, la miche de pain coupé en deux et qui servait d’assiette pour le potage. Tremper la soupe signifiait verser le bouillon sur la tranche de pain, puis commercer à servir le repas et enfin que le dîner est servi (la soupe est trempée).
Plus tard (vers 1310), la soupe a commencé à désigner par métonymie le bouillon lui-même épaissi par des tranches de pain ou des aliments solides (vers 1310), puis en vint à concurrencer potage, considéré comme plus noble.

Ce qu’on appelle aujourd’hui pain doré ou pain perdu est un dessert consistant en une tranche de pain trempée dans du lait et des œufs battus puis frite et sucrée. Ce dessert s’appelait autrefois soupe dorée, ce qui montre bien ce que désignait le mot soupe.

Les dieux brillent dans les cieux

Un peu d’étymologie


Les dieux brillent dans les cieux


Les différents noms de Dieu sont nombreux et variés selon les pays et les civilisations. Le mot dieu lui-même en français vient d’une racine indo-européenne *odei (briller) prolongé en *odeiwo à rapprocher d’un mot sanscrit qui a servi à désigner le ciel lumineux considéré comme divinité et par extension la lumière terrestre. La même racine a donné en français adieu, devin, divin, diva, déesse, Diane, jour, journal, séjour, jovial, quotidien, diurne, midi, lundi, mardi, dimanche, etc. et en anglais dismal, Jove, Tuesday, diary, journey, dial, diet, adjourn, etc.

Zeus est l'une des rares divinités grecques dont le nom est d'origine indo-européenne. En effet, l'étymologie de son nom l'associe aux cieux. Zeus est à rapprocher d'un mot sanscrit qui s'apparente au ciel, d'un mot latin dies (jour), ainsi que de la première syllabe de Jupiter (ciel – père ou père des cieux), dieu auquel les Romains l'identifieront.

En langues cananéenne et chaldéenne, dieu est dit El qui a donné Eli (employé par Jésus sur la croix : "Eli, Eli, lama sa-bach-tha-na? – Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?), Ilu qu’on retrouve dans le mot Babylone (de Bab Ilu = Dieu de la porte), Allāh en arabe, āllāhā en araméen, Elohīm en hébreu. El étant un dieu païen, la Bible emploie le mot Elohīm qui signifie dieu (El) le plus puissant (oh) avec le im qui exprime le pluriel, ici de politesse, ce qui n’est pas rare dans les langues orientales. Elohim est le nom générique de Dieu.

Beaucoup de noms hébreux seront formés à partir de El, nom abrégé de Elohim. En général, tous les noms qui se termine en français par ël ou quelquefois el incluent le mot dieu en langue sémitique : Raphaël (Dieu guérit), Emmanuel (Dieu avec toi), Gabriel (force de Dieu).

La Bible utilise également le nom de Yahvé, un mot ineffable (de in privatif et effari = parler), c’est-à-dire qu’on ne peut ni prononcer ni écrire. Pour le représenter par écrit, on emploie le tétragramme YHVH qu’on prononce Adonaï, de Adon, seigneur et , ici encore pluriel de politesse. Plusieurs théories existent sur l’étymologie de ce mot. La plus courante dit que ce nom vient du verbe havah (devenir) conjugué à l'imparfait de la forme causative (qui correspond au français faire faire). En conséquence, il se rend par il fait devenir. D’autres disent qu’il faut traduire par il est ou encore il devient, ce qui pourrait se rendre par l’Éternel, celui qui est et qui devient. Yahvé est le nom propre de Dieu. On a plus tard prononcé Jéhovah le tétragramme YHVH.

Beaucoup de noms occidentaux sont formés sur les noms hébreux dont la racine comprend la lettre J (suivie d’une voyelle). Par exemple, Jean ou Johanne (Dieu a fait grâce), Jésus (Dieu sauve), Joseph (Dieu ajoute), Joël (Yahvé est Dieu), nom qui a la particularité d’être formé sur la racine El et J.

Enfin, les langues védique, sumérienne ou syrienne utilisent, pour désigner Yahvé sans le prononcer, le mot shaddai, de shad (maître) et dai (tout puissant) qui est l’un des épithètes de Dieu et qui a donné le prénom Shad.